C’est à Ban Khoua Set que les 3 cascades Lo (Tad Lo) déversent leurs flots bouillonnants pour le plaisir des cataractophiles et celui des amateurs de belles images. Passage obligé des scootards*, c’est surtout le hameau de Ban Saen Vang qui profite de cette manne fortunée aussi quotidienne que fugace. De fait, Tad Lo désigne de façon générique l’ensemble du site incluant le village, les habitats dispersés et les chutes.
Fort de ses multiples charmes, ce petit bout de pays retient sans peine les adeptes du voyage en mode tortue.
Avantage, Tad Lo
Des atouts maîtres
- Trois cascades inégalement spectaculaires mais toutes baignables.
- Des parcours balisés à trimarder sans modération; Balisés, oui! C’est très rare au Laos.
- Proximité de villages ethniques Ta-Oy, Nyé, Pakoh et Katu – à traverser, à rencontrer –
- Une population aimable, souriante qui vit chichement de ce tourisme et n’en est pas (encore) saturée.
- Des fruiteries, des épiceries, un marché quotidien, un distributeur de billets (au fonctionnement très capricieux, ne misez pas tout dessus).
- Une belle variété de menus dans les cambuses pour répondre à la demande…(Beurre d’arachide, confiture, caviar de tomate, spaghetti bolo, curry-coco thaï, frites!)
- Une douceur de vivre dans une simplicité globale, naturelle, au stress minimal.
- Quelques « personnages clés » à croiser dont:
Mister Poh
Depuis 25 ans, le village a su profiter du développement touristique tout en maintenant son intégrité culturelle. L’intelligence et le charisme de M.Poh y sont pour beaucoup. Bien que propriétaire d’une guesthouse à succès, il a impulsé, en s’impliquant pleinement, nombre d’autres hébergements, restaurants et activités liées au passage des routards. Il a encouragé et aidé à lancer l’ouverture d’auberges aujourd’hui plus fréquentées que la sienne (il refuse de l’afficher sur les centrales de résa du Web). Il a impulsé cette diversité de l’offre en restauration en travaillant sur des recettes plus « ouvertes sur le monde ». Il a suggéré à Niay (du restaurant « I love you« ) l’idée de donner des cours de cuisine lao, Il a mis en valeur le travail de tissage des femmes et la mise en vente des produits. Il a encouragé l’accueil des voyageurs-travailleurs volontaires, lesquels ont mis leurs talents au service de la communauté.
Il conçoit de nouveaux itinéraires à suggérer aux touristes de passage.
Arguant du fait que la nature doit profiter à tous, il s’est battu contre les institutions du pays pour que l’accès aux cascades Lo reste gratuit, (très rare sur le plateau des Bolovens). Résultat cocasse: s’y rendre par la rive gauche coûte 30 000 Kip, alors que par la rive droite, c’est cadeau. En Bénévole toujours, il conduit quotidiennement le ramassage scolaire.
Le repas en famille
Une ou deux fois par semaine, il organise un dîner en famille. Vers 18h15, les convives sont invités à préparer les agapes: pluches, découpes, fabrication des nems, divers beignets, salades, brochettes et autres plats qui égaieront la table. M.Poh, mine d’or culturelle ne peut être plus prolixe que durant ces repas-événement.
En récompense, un environnement difficile à blâmer si l’on excepte parfois la présence de canettes, de bouteilles, de sac plastiques… De ce côté-là, il reste du boulot de conscientisation à propager). Cliquez sur les photos pour les agrandir.
Randonner autour de Tad Lo
Pensant m’y poser 5 ou 6 jours, il m’a fallu 3 semaines pour en décoller. Le contact avec quelques slow voyageurs comme Gilles, Eva, Lino, Mathilda, Justin, Justina, Tina, Giulia et naturellement les locaux polyglotes dont Nicolaos ou M.Poh et tous les habitants aux abords attachants fut déterminant. J’ai appris à me servir des cartes GPS, à en fabriquer et, depuis ma confortable auberge, j’ai arpenté:
- La forêt sacrée, aux arbres millénaires géants,
- Tad soung,
- les rizières,
- les plantations de manioc,
- certains villages ethniques Katu, Laven, Souay, Ta-Yo.
Des itinéraires plus aventureux
En travaillant un peu sur les cartes GPS de Nicolaos, je me suis lancé dans des itinéraires plus aléatoires. Ceux que je vais développer dans cet article demandent de lever le pouce sur les parties goudronnées…
La grotte aux 9 ouvertures, (9 hole cave), Vat Thongkham
Une des plus aventureuses de mes journées fait echo à la citation de Robert Louis Stevenson.
« L’important, ce n’est pas la destination, mais le chemin que le voyageur emprunte »
Ne figurant que sur une seule vieille carte, tout le monde m’affirme que le chemin n’existe plus! Je vais donc préparer avec minutie un tracé qui rend possible cette petite aventure. Pour cela, je croise les données de Google map en vue satellite et de Map.me
Carte haute résolution: si vous l’agrandissez (double-clics) sur le tracé jaune, vous visualiserez précisément les chemins puis la partie qui passe à travers les cultures. Si vous désirez en profiter: depuis un smartphone, cliquez ici et ouvrez là sous « Map.me » ou « Organic Map »
Cette promenade de 12km environ à partir de Sanonne (croisement de départ en jaune) impose un certain nombre de vérifications en cours de progression, car les chemins qui ne sont que des accès aux parcelles cultivées évoluent avec le temps. Ça ressemble à une course d’orientation, la carte, la boussole et la règle étant réunies sur votre terminal.
Je navigue à vue. Dès la sortie du village, le doute s’installe, je sollicite un couple de paysans. Dialogue de mimes
– Il te faut un scooter, il y a une piste à Temesangthong
– J’aime marcher, mes jambes sont solides.
Ça les fait marrer, je n’en attendais pas moins d’eux.
– C’est par là.
Il agite son bras vers une direction purement cardinale qui passe par des sillons labourés droit vers le relief.
Je me lance à travers ces mottes de terres arides, j’enchaine dans un champ de manioc sur pied avant de rejoindre une trace qui pointe dans l’axe de ma quête.
Je vide régulièrement mes Crocs* des amas de terre et de poussière ramassés.
Ce sketch va se répéter autant de fois que je croiserai des travailleurs. Durant ces pauses gesticulatoires, on m’offre de l’eau, de l’ombre. Une fois, j’aide à désembourber un petit camion. Chaque rencontre fait s’écarquiller le faciès de mes interlocuteurs, les fait rire (il faut avouer que j’en fais des caisses).
C’est ainsi que je maintiens le cap. La partie 100 % GPS (15 minutes seulement) me fait passer à travers champs et un peu de forêt, je rejoins un cimetière abandonné où quelques stupas luttent contre la friche galopante. Je retrouve un sentier qui m’amène à Thongkham, le village éponyme du temple et vers la fameuse grotte aux neufs orifices.
Beerlao en compagniede l’épicier.Il me reste 1km de piste pour rejoindre le temple perché puis la « grotte » convoitée. Dans la fôrêt le chant de « cigales » stridulant vibre au point que je me demande s’il n’y à pas une ponceuse à ferraille sur des haut parleurs, volume et sonorité impressionnants !
Le temple n’a d’original que sa position au sommet de cette montagnette.
La vue embrasse un panorama de plaines et de reliefs lointains dont les grandes lignes presque régulières se découpent sur un ciel à la fois brumeux et plein de lumière.
Le chemin monte un peu plus haut, plusieurs stupas accompagnent mon pas jusqu’à la fameuse « grotte ».
Falaise à trous
Les neufs trous sont bien là. À 3m du sol, sagement alignés à l’horizontal sur un bout de falaise en dévers! Une échelle donne accès à l’un d’entre eux. Une fois grimpée, quelques bâtons d’encens brûlés témoignent de passages votifs. Les ouvertures communiquent entre elles tandis que chacune s’enfonce dans le roc en se rétrécissant si vite que, même en rampant, mon gabarit n’avance pas de 5 mètres. Nullement déconfit, je comprends naturellement la faible popularité du lieu.
Il reste que l’effort et le vécu pour y parvenir resteront gravés dans mes souvenirs de randonneux.
Il faudra que j’atteigne le joli village de Ban Gniew, là où la piste vire à 90 degrés. Un 35 tonnes des plus inattendus sur une telle piste m’embarque vers la « nationale ».
Le retour final vers Tad Lo fut enfantin comme de coutume.
Les grottes de Phouphasouk
Je fais court.
Les grottes de Phouphasouk se trouvent au nord de Salavan, à plus de 50km hors des Bolovens. Les boucleux ne font pas le détour, ils savent que la région de Thakhek, un peu plus au nord, va leur offrir une autre « loop » sur cette thématique.
Abusivement ambitieux depuis Tad Lo, l’accès aux grottes de Phouphasouk sans véhicule tient de la chimère, notamment parce que les 15km des pistes finales ne traversent aucun village laissant planer une absence de trafic fatale à l’autostoppeur. J’emprunte donc la mobylette de M.Poh.
Soyons prudents, la route est perforée ici et là et, imprévisibles, ce sont les vaches et les chèvres qui règlent la circulation. Le plan affiché à l’entrée du site laisse penser que cette incursion souterraine enfile une dizaine de salles magistrales. La réalité est un cheminement confortable, éclairé sur 600m qui traverse 4 théâtres Wow de 15m de plafond. La suite aqueuse s’adresse aux spéléologues et autres troglodytes amphibies du secteur.
Peu coutumier de ce type d’environnement, ce petit tour pur touriste me convient parfaitement. Quant à mériter tous ces kilomètres poussiéreux, c’est peut-être à débattre.
La Traversée du plateau des Bolovens
De Ban Nateu (hameau de Tad Lo) à Ban Kok Phung Taï (le village Ketu du formidable M.Somphone et du célèbre M.Hook), en passant par Tad Fai Mai. Autrement dit la traversée du plateau d’ouest en est, cinq à sept heures de boulot. C’est quasi Tad Lo – Thateng en passant par la seule cascade qui s’entoure de colonnes géométriques, formations karstiques uniques dans la région. Ce détour est la plus jolie partie de cette randonnée. Inenvisageable en deux roues, très très peu fréquentée, même par les locaux.
Je ne vous décris pas le chemin, l’article est assez solide ainsi.
En revanche, je vous confie la carte et vous préviens d’être très prudent dans la descente vers la cascade, il est aisé de perdre la trace en ce terrain forestier très abrupte qui ne laisse que peu d’alternatives de cheminement
Vous devriez vous en sortir en ouvrant ce lien sur votre téléphone avec Map.me ou Organic map Tad Lo – Ban Kok Phung Taï
- en violet l’itinéraire « direct
- en rouge, le détour vers la cascade
Merci tout particulier à Nicolaos qui, aussi généreux qu’affable, m’a tant donné et appris durant mon séjour à Tad Lo.
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*Scootards –> routard en scooter
* Crocs –>
Sabot therformé, confort absolu. Bien que jugées hérétiques, je randonne avec.