Repère placé sur ma carte fétiche des curiosités géodynamiques à parcourir « un de ces quatre », combiné au fait que j’ai été très sage dernièrement, je ne me suis pas privé de désert.
Une forêt tropicale asséchée
« Forêt tropicale asséchée » plutôt que désert selon les géologues et les puristes, sous un climat semi-aride, les sols sont riches en minéraux mais pauvres en nutriments. Ces « sables fertiles mélés à des boues stériles » laissent juste une chance à certains arbustes xérophiles et quelques cactus de croitre pour qu’ils apportent leur touche de verts à cet horizon de feu.
C’est un fait, l’érosion et l’évaporation au cours de ces 60 000 000 dernières années (une paille!) ont façonné un paysage spectaculaire tant dans son rôle de panorama que celui de labyrinthe à explorer.
Parvenir au Tatajojocoa
Très à l’écart de la nationale 45 sud, atteindre le site sans véhicule personnel requiert assurément le goût de la marche sous le soleil caniculeux, détails:
- Se faire larguer par le bus de « grande ligne » au croisement du village d’Aipe lequel sied de l’autre coté du rio Magdaleina.
- Traverser le village et marcher jusqu’à la rivière pour atteindre un embarcadère de fortune. Le chauffeur de la petite barge jaune vous repère d’en face et vient vous chercher… Être patient, c’est mieux.
- Passé le rio, il reste à rejoindre le village et à chercher un hébergement. Y’en a plein et de toutes catégories, inutile de passer par booking…
- Prendre le temps de respirer Villavieja.
- Du village, taxis, motoraton (tuktuks), motos et guides abondent à tous les tarifs et selon des prestations variées:
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- Le dépot sur l’un des 3 accès remarquables;
- Le transport avec accompagnement à la journée (en jouant au guide);
- Répondre à votre appel (Whats App) à la fin de votre visite afin qu’on revienne vous chercher.
La moto reste le transport le plus abordable sachant que l’aller-retour frôle tout de même 50 000 pesos, une fois et demi le coût de ma chambre.
La logistique étant assimilée et ma prospection rondement menée, je me lie à Noël et sa poussive 125cc.
Top-là! il me déposera au désert rouge le premier jour et au gris le jour suivant, à demain.
Le désert rouge de la Tatalilicoa
Récurrent ce sentiment, chaque fois que j’ai la chance de rester scotché de cette façon, je rerere-réalise que je voyage d’abord pour ces instants suspendus face aux oeuvres du musée de la planète.
Mon regard se perd dans ces horizons torturés, le paysage m’appelle, je veux le toucher, le fouler, le photophoner, jouer avec lui.
La classe totale:
- Un océan de sable solide taillé au scalpel et cuit par Tonatiuh, Dieu du soleil local lui-même.
- Une dépression où les dunes acérées se parent de toutes les combinaisons de rouges, de briques et de rouille.
- Un espace de quiétude, duquel les brises exhallent leur délivrance alors que le temps se met en grève.
Flamboyance des formations
Depuis les différents « points de vues » de la route, des accès plongent dans le labyrinthe dont les circonvulations mal balisées, offrent une foule de variantes à ausculter.
Le meilleur moyen d’en profiter consiste à s’y perdre exprès, de s’éloigner de la trace qui n’est, c’est très clair, foulée par notre ami le touriste furtif que sur son premier tiers.
En avançant un peu il est possible d’atteindre des solitudes et des cadrages d’images plus exclusifs (enfin presque).
J’emprunte des ravines qui, je le sais, ne mènent nulle part ailleurs qu’à une photo de plus, un univers semblable mais différent. Je parcours trois fois le chemin pour observer plus de ces sentes-cul-de-sac, de ces textures et de ces ocres.
Plus ludique, tu meurs…
La texture « du désert rouge » est celle d’une terre craquelée façon Ben Grimm, le colosse rocailleux des 4 fantastiques. Lorsqu’on touche cette croûte solide, il semble qu’elle protège une couche de glaise malléable, à l’intérieur ça reste mou!
Le labyrinthe de Cuzco
C’est la boucle balisée du désert rouge qu’il faut randonner « à minima ».
À seulement 5km du village, on peut envisager l’aller retour à pied. Cela dit, si la distance totale de cette journée reste bienveillante, le climat lui, ne fait guère dans la tendresse.
L’accès à pied depuis le village + la rando dans le dédale + le retour à l’auberge (15km) doit être apréhendé avec réalisme. La marche par 40 degrès, ça allonge les distances.
Je ne regrette nullement ni le dépôt matinal en moto par Noël qui m’a permis de passer 3 h dans cette partie du désert et d’en revenir pedibus en 45mn.
Le désert gris de la tatakikicoa
Les parties insolites du désert gris se trouvent à 13/15km du village de Villavieja, Moins photogénique que son rougeot de frangin, le désert gris, aussi appelé « Vallée de la tristesse » à pourtant de quoi se défendre sur le plan orographique:
- canyons étroits;
- bois pétrifié;
- formations fantasmagoriques;
- cheminées de fée.
Pour combler son déficit de séduction, une combinaison de légendes, croyances et quelques infrastructures ont été promotionnées par les marketeux du tourisme local.
Accrochez-vous:
La vallée des Xilópalos
Xilópalos fait allusion au bois pétrifié/silicifié (fossiles de troncs transmutés en pierre) qui sont exposés/mentionnés ici et là durant la très courte, débonnaire et commerciale marche qui se termine au bar de la piscine! En plein désert… Sans commentaire.
La vallée des désirs
Baptisée à dessein, cette partie du Tatacoa gris fait courir une légende qui pousse le visiteur à bricoler des cairns.
Le jeu consiste à empiler des pierres en une tour proportionnellement haute à l’improbabilité du souhait.
Il faut aussi que la construction reste suffisamment fragile pour qu’elle s’écroule sous l’effet du vent car ce n’est qu’à cette condition que le vœu se réalisera. Inutile de vous dire qu’il est difficile de se tromper de chemin sur cet itinéraire.
Vous en voulez une autre ?
Bien bourrine?
La Grotte du Baiser
C’est une petite grotte munie d’une ouverture qui donne sur le désert. « Selon la légende », le couple qui s’embrasse à l’intérieur de la grotte restera uni pour la vie. L’amour ça tient vraiment pas à grand chose! Mais pourquoi se priver?
Séquence photo.
Vallée des fantômes
Dans cette zone, c’est halloween à tous les carrefours. L’érosion a poli des silhouettes fantomatiques gris cratère. Pénitents drappés, sagement alignés, les fantômes dominent et veillent…
Cette partie du désert gris est incontestablement la plus puissante en images, en évocations et en émotions. On y retrouve la prépotence, conjuguée de l’eau et du vent sur le minéral, déjà ressentie dans le désert rouge.
La trace balisée suposée de deux heures de promenade ne les fait pas, c’est ce qui me déçut le plus.
Épilogue
Déposé le 2e jour dès 8h le matin sur le point le plus éloigné du site par le père Noël, j’ai rejoint les vallées successives pour une part à pied mais aussi en stop. Un gentil touriste du sud de la Colombie ayant eut pitié du marcheur vouté en plein cagnard. Youpie!
Dédié à Jojo, Lilie et Kiki, mes tantes adorées.
Chronologie du voyage:
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