Le palma de ciero est à la Colombie ce que l’érable est au Canada, rien de moins que l’arbre national. Il fournit des bougies plutôt que du sirop, y a pas de sot métier. Leurs forêts risquent l’extinction, suite à l’exploitation forcenée par qui vous savez…
L’arbre est fragile et joue les capricieuses, on sait qu’il ne croit que dans des conditions d’altitude, de climat et d’exposition au soleil très sélectives. Par ailleurs, il se reproduit mal malgré les milliers de fruits/graines qui mûrissent en grappes spectaculaires tous les deux ans. (lire cet article très bien fait).
Protégé comme nul autre végétal en Colombie, ami bûcheron laisse ta hache à la maison, car c’est la case prison qui t’attend (sans passer par la case départ).
Les sites où s’élèvent les palmiers de cire se font rares,
- La vallée de Cocora (près de Salento-Filandia) le plus connu, il est la proie d’un tourisme idiot.
Accès payant, le site est un Disneyland où les cars de chinois jouent au coude à coude avec ceux des Japonais.
Les files de candidats aux « Selfies références », grotesques et caricaturales sont ahurissantes. À fuir absolument! - Plus à l’écart des tour-opérateurs, la vallée de Tochecito serait la plus vaste réserve de Colombie. Tochecito à su promouvoir des itinéraires de randonnées très attrayants et c’eût été mon choix si,
- Le spot confidentiel de La Samaria sur la commune de San Felix ne m’avait été soufflé à l’oreille par German, mon compère avisé.
Un bosquet méconnu, en tout cas mentionné ni par les guides par les moteurs du Web.
–> Gardez le tuyau pour vous.
Randonnée facile
7 h15, l’unique buseta Salamina/San-Félix me dépose dans ce micro-village à peine réveillé. J’ai le plus grand mal à trouver un café et un pandebono, le temps de laisser la température sortir de la nuit et se montrer plus clémente.
Normal, le Pueblo touche les 2700 m et la randonnée culmine à 3000 m tout ronds.
Totalement seul, je prends le chemin qui se dirige vers la formidable esthétique de ces dadais filiformes. Paresseux aller-retour de 4 h, l’itinéraire ne présente aucun aléa, aucune brusquerie, ma solitude ajoute du zen au paysage.
Du bon lait
Ce vallon de San-Félix est un immense pâturage vert-vif, gras et humide. Paradis de la Holstein et de la Montbéliarde, les vaches paissent en paix et sont traites sur place.
Je vois le fermier traîner ses bidons en fer blanc de pis en pis. Il charge ensuite le butin sur une courageuse mobylette pour un parcours du combattant en direction retour vers la fromagerie… et revient traire à raison de six voyages par jour me dit-il.
Il ajoute l’œil complice et le faciès lumineux :
– C’est du bon lait !
– Et vous le méritez, c’est du gros travail!
Au fur et à mesure que je gagne le bosquet puis atteins le col, les palmiers de cire se font plus nombreux. Leurs statures fendent l’espace, cisaillent l’horizon. Sagement répartis, ils montent la garde d’un val paisible où nul dormeur ne s’est assoupi exsangue depuis quelques années.
Aparté pertinent
Cette partie du Caldas fut particulièrement victime des FARC qui déchirèrent le pays pendant plus de 40 ans. Confisquant terres et biens, les guérilleros exécutèrent des générations entières et firent de ces vallons des maquis longtemps imprenables.
J’ai eu la chance de parler avec Simon, unique survivant d’une famille propriétaire de ces terres auquel l’état a finalement rendu la jouissance: Un témoignage digne de figurer parmi ceux de la casa de la mémoria de Medellín
Simon me permet d’emprunter ses chemins privés pour une meilleure immersion aux pieds des géants et un retour différent vers le village… faire une boucle plutôt qu’un aller-retour.
Qui se plaindrait d’un tel privilège ?
De retour sur le parc central de St Felix, je profite de l’attente de la chiva de Salamina pour acheter l’un des fromages fabriqués sur place. Du caillé au double crème, les textures moelleuses des Saint-Félix tombent sur le palais comme des ondes de fraîcheur, fines saveurs fermières, je les dévore avec bonheur.
Le bus me ramasse vers 16 h, j’échange mes impressions idylliques avec le chauffeur, il arrête deux fois le véhicule juste pour que je prenne tranquillement des photos sur le chemin du retour. Décidément la Colombie ne déçoit jamais.
En terminant sa journée à Salamina vers 19h ce chauffeur aura roulé 13 h de lacets interminables sans être relayé…
madre de dios que locura!
Chronologie du voyage:
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