J’ai remarqué le Cerro Batero dès mon arrivée à Riosucio car il domine le relief pourtant riche en sommets volcaniques végétalisés …Mais il est le seul à présenter une « aiguille » et une belle dalle rocheuse.
J’ai naturellement deviné que l’itinéraire qui monte à la croix sommitale dépassait la simple randonnée…
Aucune déception, le Cerro Batero propose une rando-escalade engagée. Après avoir repoussé deux fois le jour de l’ascension (à cause de pluie), j’ai réuni une petite bande d’amis afin de partager l’adrénaline de cette journée.
Comment se rendre au départ du chemin.
Distance totale 15 Km (marche d’approche et descente incluse)
On évite la marche d’approche, longue et fatigante au soleil en prenant la chiva à 8h30 depuis Bonafont (2000pesos= 0,65Can $) . Elle nous dépose après moult chaos au hameau de Botero d’où part le chemin de rando ascension.
Ensuite, même lorsqu’il se rétrécit, le chemin est 100% évident nul besoin d’agence de voyage ou de guide pour le suivre. En revanche, pour notre groupe de 5 randonneurs s’est félicité de la présence de Sair, ouvrier agricole local (qui aide parfois Thomas à la Prasera) qui s’est révélé une excellente source d’information culturelle au long du chemin.
À savoir:
Les agences de tourisme facturent le trip quasi 200 000 pesos (70$ canadiens/ personnes) mais ce coût considère un départ de la promenade depuis Medellin, ou Jardin… Cela augmente logiquement le coût de déplacement. Cela dit c’est très cher, faites le vous même.
Descente et retour au village.
Au retour de la randonnée on trouve(ra) une jeep collective à Botéro pour nous ramener à Bonafont (3000 pesos par personne = 1can$). attention pourtant de ne pas dépasser 16 h, sinon c’est 5km à pied ( ça use les souliers)
Point de départ de la randonnée: Hameau Batero.
Conditions idéales conseillées:
- Bonne forme physique,
- chaussures de marche,
- matériel de via ferrata (cuissard et longe double).
Comme c’est introuvable sur place, on l’a fait en libre
La randonnée
On attaque le chemin depuis le hameau de Batero (2161 m d’altitude) à 5km de Bonafont environ. À partir du « quartier Batero » (1700 m), la randonnée – ascension vers le monolithe se trouve sur la droite du panneau qui indique le chemin.
Ceci est la vidéo empruntée à https://fr.wikiloc.com/ qui relate en détail et en espagnol l’ascension un jour très humide (avec un point de départ différent mais la même section finale puisqu’elle est unique), ce n’est donc pas 100% l’ascension décrite dans cet article.
On commence l’ascension vers le « Cerro Batero » en passant par un chemin facile qui à souvent été taillé en escalier avec contremarches et rampes. Il traverse les plantations de café puis s’enfonce dans une végétation brouillonne entre forêt, platanos et autres arboles en direction des parties rocheuses . La pente est très raide.
À 2000 mètres d’altitude environ, le terrain se redresse radicalement à la verticale. On progresse en grimpant le rocher végétalisé, on peut parler d’escalade de niveau 3+. Le chemin n’est pas plus large que vos deux chaussures, il s’est parfois totalement écroulé. Il faut alors s’accrocher à la dalle: (un pas en adhérence avec grand écart sur dalle ( 4+ que seuls les grimpeurs passeront) ou faire un crochet en descendant dans la pente. Dans les deux cas ce sont des passages délicats.
Pour une escalade de base donc facile , l’itinéraire reste clairement « engagé », on alterne les prises au rocher et celles aux branches, racines et autres arbustes qui étreignent le rocher. De vieux câbles « de sécurité » sont installés ici et là, il sont les bienvenus surtout à la descente.
On franchit ensuite des sections avec barreaux scellés dans le rocher l’ambiance est aérienne façon via ferrata. Ces tiges d’acier à béton armé forment des pédales ou marches. Quelques câbles ont aussi été scellés dans la falaise. Ces équipement sont très vieux et n’inspirent pas forcément confiance… Haut les cœurs!
Ce sont les locaux qui ont mis en place cette voie pour faciliter l’accès au sommet. Si vous êtes « guide » équipeur vous allez fuir ce bricolage en criant au fou.
Si vous êtes grimpeur, alpiniste ou simplement randonneur avec expérience de terrain d’aventure et goût de l’adrénaline. Cette rando-aventure va vous ravir.
Si vous êtes un randonneur qui n’avez fréquenté que les itinéraires aseptisés et racketeurs de la SEPAQ (Québec), où tout est interdit et hors de prix, passez votre chemin vous allez vous sentir en insécurité.
Un sommet à deux pointes.
La toute derrière section est un couloir terreux qui reste humide même après huit jours sans pluie.
Enfin on rejoint un chemin rocailleux sur la crète ( à droite en sortant du couloir – 65degrès-), qui se rend au sommet (2240 mètres d’altitude) c’est là qu’est plantée la croix de 3,5 mètres que l’on voit depuis le bas.
Cette croix a été érigée au début du XXe siècle grâce au travail ardu et courageux d’un paysan nommé « Juan de Jesús Trejos » qui, aidé de sa famille a marqué de sa patte le joli monolithe du Cerro Batero. (l’histoire complète est ici en espagnol ou plus bas dans l’article).
Une vue dominante à 360 degrés sur les petites villes et les reliefs de la région s’offrent à nous.
Après avoir profité de ce fantastique panorama, il faut emprunter la descente qu’on qualifiera de délicate. Aussi raide que la montée (étonnant non ?) elle est glissante même par temps sec, une longe et un mousquetons sur quelques câbles-rampes scellés se sont pas un luxe. Pour le reste du chemin, chutes et fond de culotte terreux sont à envisager.
Retour au Hameau, avec de la patience et une boisson fraiche (une tienda va vous fournir cela), un collectivo Jeep vers 15h permet de revenir à Bonafont (…Assis sur le toit arriba!)
Histoire du Cerro Batero
Le Cerro Batero est situé dans la commune de Quinchía, appelée « La Villa de los Cerros » car l’environnement n’est que collines. Cette municipalité appartient au département de Risaralda – Colombie.
Le nom « Cerro Batero » fut le plus utilisé par les chroniqueurs espagnols, bien que les indigènes de la région l’appelaient initialement « Cerro Carambá ou Karambá ». Ce pic était un sanctuaire pour les tribus Ansermas, elles présentaient leurs offrandes au Dieu Xixaraca, lequel protégeait le peuple et prenait soin des cultures de maïs et de chontaduro.
Selon la légende, au sommet de la colline vivait Xixaraca, seigneur des tribus Ansermo ainsi que la déesse Michua, dame du courage et de la guerre.
Dans les années 80 du siècle dernier, Don Juan de Dios Trejos et sa famille vivaient dans le hameau de Batero, au pied de « la grande masse à tête d’aigle« . L’ombre de la colline abritait sa maison, le soir depuis chez lui Don Juan observait le glissement des nuages et du brouillard qui semblaient descendre du sommet.
Il a souvent pensé que sur le pic où Xixaraca avait vécu, il faudrait planter une grande croix pour bénir ce territoire souvent meurtri par la violence guerrière. La mission semblait impossible, car la seule ascension possible se trouvait du côté de Bellavista, en face du village de Bonafont.
Sans l’appui de personne, Don Juan de Dios Trejos et ses fils puisent alors dans leurs maigres économies et construisent trois échelles métalliques. Ils les encastrent dans les rochers pour s’y accrocher et évitant de regarder vers le bas atteignent l’étroit plateau sommital.
Par sections, ils portent la croix au sommet de la colline de Batero et l’assemble. Ce fut une tâche titanesque et périlleuse, car le vent soufflait fort, tandis que pluie et grêle balayaient le sommet.
Le quatorze septembre 1984, le père Iván Velásquez, curé de Bonafont, monte avec les ornements. Surmontant son vertige et sa peur de tomber, il atteint le sommet du Batero. Avec l’aide de Don Juan Trejos, il célèbre une première messe sur le roc de l’ancien Karambá.
Depuis lors, tous les quatorze septembre, les fidèles catholiques de Batero montent en pèlerinage à la Croix et lorsqu’ils disposent d’un prêtre jeune et courageux, ils célèbrent la messe dans le même recueillement que celui du Père Velásquez.
La colline de Batero recèle de nombreuses légendes. On parle de grottes à sa base qui retiendraient les aventuriers qui ont osé y pénétrer. Trois chutes d’eau s’écoulent du promontoire, ce seraient les larmes de la déesse Michua, qui pleure encore sa douleur de l’ingratitude de son peuple.
Chronologie du voyage:
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